Qu’est-ce que le national-catholicisme ?

Par Quentin Douté, membre de la rédaction de l’Intransigeant.

Il est des périodes de l’Histoire où apparaît clairement aux esprits lucides le combat du Bien contre  le Mal, le duel entre l’Archange Saint Michel et l’ange rebelle Lucifer : l’alliance des Romains et des Germains contre les Huns d’Attila, la lutte des Carolingiens contre l’invasion islamique, les Croisades et la Reconquista, le combat de la Ligue catholique contre le protestantisme profanateur et iconoclaste, les révoltes chouanne et vendéenne, mais aussi celles des Cristeros mexicains ou des nationalistes espagnols contre des gouvernements voulant éradiquer le christianisme, le combat sur le Front de l’Est des soldats européens contre l’Armée Rouge, ou encore celui de notre armée française contre la subversion marxiste en Indochine et en Algérie…

De nos jours, le Mal prend le visage du mondialisme « déconstructeur », acharné à détruire tout ce qui constitue la civilisation européenne. La haine des identités nationales du vieux continent, de la race blanche, de la religion chrétienne et même de l’harmonieuse complémentarité homme-femme, motive cette idéologie diabolique qui veut implanter sur les ruines de la Chrétienté défunte sa république universelle cosmopolite, vieux rêve des loges maçonniques et du messianisme talmudique, dans laquelle un État totalitaire, à la fois capitaliste et communiste (à la chinoise) ne tolérera plus aucune protection pour la personne humaine, écrasant tout corps intermédiaire comme toute cellule familiale, annihilant toute véritable liberté : l’enfant, comme le rêvait déjà Platon, appartiendra totalement à cet État omnipotent dès sa naissance, n’étant que le rejeton d’une procréation de hasard entre deux inconnus, séparés aussitôt la tâche accomplie ; mais il ne grandira que pour être la proie dès la petite enfance des délires LGBT, de la nouvelle religion écologiste et du fanatisme anti-raciste poussant à l’ethno-masochisme et au métissage obligatoire. Si l’Antéchrist n’a pas encore instauré leur État mondial rêvé, son idéologie diabolique est déjà imposée au moins partiellement par les gouvernements actuels, les jeunes générations étant dorénavant de plus en plus abîmées psychologiquement comme physiquement.

Face à ces idéologies de désagrégation et de mort, il importe d’opposer une doctrine saine, pure, reposant sur ce qui a fondé notre civilisation chrétienne.

Celle-ci, par l’invasion musulmane de l’Afrique du Nord et du Proche-Orient d’un côté et l’évangélisation des peuples germaniques puis slaves de l’autre, s’est identifiée depuis le VIIème siècle à l’Europe et donc à la race indo-européenne, aryenne disait-on jadis, qui la peuplait. Comme le remarquait fort justement le pape Léon XIII, « il paraît évident que c’est à l’Europe que Dieu a assigné le rôle de répandre peu à peu sur la terre les bienfaits de la civilisation chrétienne » (note 1) ; plus tard, Antonio de Oliveira Salazar notait « On ne saurait qualifier de préjugé racial la constatation d’un fait historique tel que la supériorité très marquée de l’Européen dans la tâche de répandre la civilisation parmi les peuples de la terre », « La vérité cependant est que le progrès se mesure, partout, aujourd’hui encore, au degré d’occidentalisation atteint et que les régressions se manifestent en sens contraire », et il regrettait amèrement que l’Occident « a perdu malheureusement le courage d’affirmer sa supériorité » (note 2). Ce sont les peuples blancs qui ont apporté partout à travers le monde, à côté d’innombrables bienfaits matériels entraînant notamment l’accroissement numérique de ces populations, la croix du Christ et Son message révélé. La haine contre les Blancs ne peut que se retourner, tôt ou tard, contre le christianisme qu’ils ont apporté (ce que l’on peut constater notamment avec les nombreuses conversions à l’islam chez les racialistes noirs) : pour tout chrétien, blanc ou non, la défense de la race blanche est un devoir, de vérité et de reconnaissance d’abord, de protection de notre sainte religion ensuite. Leur culpabilisation et l’obligation morale du métissage poussant à leur extinction doivent donc être considérées comme des manœuvres sataniques à combattre sans scrupule.

Mais l’Europe n’est pas un tout uniforme et homogène, elle n’est telle que par l’existence de ses multiples nations, avec leurs caractères propres : qui veut défendre l’identité européenne doit obligatoirement pour cela défendre celle des différentes nations qui la composent.

Parmi celles-ci, la France ne peut que se placer parmi les premières, de par son ancienneté comme de par son importance. À l’heure où l’Occident était partagé entre des royaumes suivant l’hérésie d’Arius et des tribus païennes, alors que l’empereur de Constantinople épousait l’hérésie monophysite, le royaume franc devint, par le baptême de Clovis, le défenseur temporel de la vraie Foi, la fille aînée de l’Église. L’expansion des Francs vers l’Est fut toujours accompagnée dans les siècles suivants de l’évangélisation des peuples vaincus, au point que, sous Charlemagne, la Chrétienté latine fut presque entièrement soumise au sceptre franc. Sauveur de l’Europe chrétienne grâce aux victoires de Charles Martel qui marquèrent l’arrêt des invasions islamiques, protecteur du Saint-Siège avec la formation par Pépin le Bref des États pontificaux (dont la France sera aussi le dernier défenseur) (note 3), le royaume des Francs fut la patrie de la plupart des croisés partis en Orient délivrer la Terre Sainte, croisade prêchée pour la première fois par un pape champenois dans la cathédrale de Clermont-Ferrand. Après les croisés, ce furent d’innombrables missionnaires qui partirent de l’hexagone pendant quatre siècles évangéliser les quatre coins du monde. Cette vocation catholique de la France fut sauvée par le peuple français lui-même, contre son souverain « légitime »,  quand il refusa un roi protestant et le força à se convertir à la vraie Foi s’il voulait gouverner. Dieu marqua l’intérêt qu’Il porte particulièrement à notre nation en nous envoyant sainte Jeanne d’Arc la sauver à l’heure où sa disparition paraissait certaine.

L’apostasie officielle de la France, par son rôle dans la diffusion des « Lumières », par la Révolution maçonnique dite française, par la politique de laïcité de la IIIème République, est un des plus grands drames de notre Histoire et poussa jusqu’au bout la comparaison maintes fois entreprise pour son éloge avec le peuple hébreu de l’Ancien Testament : elle aussi finit par se ranger derrière Caïphe et par choisir Barabbas… Pourtant, la France catholique ne put disparaître d’un coup : un siècle après 1789, la France était toujours le pays fournissant le plus de missionnaires, et ce fut l’un d’eux, quand l’Église a rendu les armes au monde et sombré dans le libéralisme, qui défendit la Tradition et sauva la Messe de toujours. Parmi les écrivains défendant la doctrine catholique contre les erreurs modernes, là aussi les Français furent au premier rang, et de nombreux étrangers apprirent par eux les remèdes qu’ils appliquèrent dans leurs propres pays contre un mal commun. Que la France, dès avant même la Révolution et de par ses rois les plus prestigieux, ait commis de graves erreurs (alliance avec des princes protestants contre les Habsbourg catholiques (note 4) ou même avec le sultan turc à partir de François Ier), on aurait tort d’en conclure qu’il nous faut la renier et la condamner à un second rôle pour mieux défendre la civilisation européenne : l’Europe n’aurait jamais été ce qu’elle a été sans notre pays.

Ceci étant dit, le national-catholique ne peut être qu’hostile aux idéaux de 1789 officiellement promus par quasiment tous les régimes depuis cette date, et donc foncièrement contre-révolutionnaire. La contre-révolution en France est néanmoins synonyme pour beaucoup de « royalisme », réaction parfaitement compréhensible historiquement, mais bien trop limitée sur le plan doctrinal : l’expérience historique, en France comme à l’étranger, nous montre abondamment que l’alternative ne peut se résumer en « bonne monarchie/mauvaise république », et on peut voir aussi bien d’innombrables monarchies décadentes empoisonnées par tous les principes modernes (dans les pays protestants, mais aussi en Belgique, en Espagne, sans compter la monarchie maçonnique italienne spoliatrice du Saint-Siège) que quelques bonnes républiques réellement catholiques (dès le XIXème siècle avec Garcia Moreno en Équateur, au XXème siècle avec le Portugal de Salazar, l’Autriche de Dollfuss ou la Slovaquie de Mgr Tiso). On ne peut tout miser sur une éventuelle restauration, d’autant plus qu’elle dépend de prétendants qui sont tous, à l’heure actuelle, partisans d’une monarchie parlementaire.

Dès l’époque de la Monarchie de Juillet, des catholiques comprirent qu’ils ne devaient pas lier le sort de la vraie religion avec une dynastie à l’existence forcément passagère et à l’évolution toujours incertaine : « Évitez les factions de toutes sortes ; nous appartenons exclusivement à notre Église et à notre pays » (note 5), telle fut la ligne suivie par Louis Veuillot, Émile Keller, Mgr Freppel ou encore Albert de Mun de 1840 à 1914. L’entre-deux-guerres vit l’existence d’une Fédération Nationale Catholique, avec le soutien officiel de l’épiscopat et compta plusieurs millions d’adhérents : dirigée par le général de Castelnau, elle comptait parmi ses dirigeants des parlementaires qui seraient aujourd’hui qualifiés « d’extrême-droite » comme Xavier Vallat et Philippe Henriot, et constitua la seule tentative réussie de regroupement politique des catholiques français. La Révolution Nationale du maréchal Pétain, si elle n’était pas officiellement catholique, alla sans conteste dans le bon sens et fut un grand espoir pour les catholiques contre-révolutionnaires : l’Épuration n’en a été que plus douloureuse pour notre camp. Après-guerre, si la Cité catholique de Jean Ousset fit un bon travail doctrinal, son refus de l’action politique fut toujours très dommageable ; au moment de la guerre d’Algérie, le Mouvement populaire du 13 mai dirigé par le général Chassin et Robert Martel sauva l’honneur en défendant l’Algérie française sous le signe du Sacré-Cœur. Ainsi, la ligne nationale-catholique est solidement enracinée dans notre histoire.

Pour autant, on ne peut négliger sans injustice de précieuses expériences étrangères. La « démocratie organique » instaurée par Salazar qui s’est maintenue au Portugal plus de quarante ans est sans doute la plus instructive comme expérience gouvernementale sur un temps long, ce que ne permet pas notre courte parenthèse de Vichy, pleine de projets intéressants et ambitieux mais bien trop vite avortés. Son « Estado Novo » reposait sur cinq piliers : Dieu, la famille, le travail, la patrie, l’autorité. Sa « république corporative » comme son remplacement des partis politiques par une unique « Union Nationale » avaient pour but de remplacer les stériles querelles politiciennes par une politique basée sur le réel. Par son organisation de jeunesse comme par sa Légion, le régime se préoccupait d’enraciner ses idéaux dans la population. Enfin, par sa défense intransigeante de l’empire colonial portugais, Salazar restait fidèle, en pleine décolonisation, à l’idéal civilisateur européen.

Le national-syndicalisme espagnol, dans sa phase première avec des penseurs de la valeur de José Antonio Primo de Rivera, Onesimo Redondo et Ramiro Ledesma Ramos, ne peut être négligé non plus par le militant national-catholique. Il présente un certain équilibre entre la nécessité d’un État autoritaire et d’une économie au service du Bien commun et le respect de la dignité de la personne humaine : « La Phalange Espagnole considère l’homme comme un ensemble formé d’un corps et d’une âme, c’est-à-dire capable d’un destin éternel, comme un porteur de valeurs éternelles. Ainsi donc, on accorde le plus grand respect à la dignité humaine, à l’intégrité de l’homme et à sa liberté. Mais cette liberté profonde n’autorise pas à saper les fondements de la vie commune publique. » (note 6) L’évolution du national-syndicalisme en tant que doctrine d’État sous le général Franco, durant près de quarante ans, pas toujours heureuse (note 7), n’en est moins instructive.

Enfin, même s’il n’eut jamais le pouvoir, on ne peut oublier sans faute grave le rexisme belge, aussi bien son fameux chef Léon Degrelle que sa doctrine elle-même, formulée notamment par José Streel : à rebours d’un certain nationalisme positiviste croyant avoir rempli son devoir quand il établit de bonnes recettes pour les institutions, la diplomatie et l’économie, il montre que le plus important dans la politique est son sujet, la personne humaine elle-même, car « Ces rouages, si bien conçus et agencés qu’on les imagine, seraient d’un piètre rendement si la qualité humaine des membres de la communauté ne leur permettait d’atteindre aux meilleurs résultats. Le Bien Commun exige que tous aient un corps sain et vigoureux, un esprit discipliné et cultivé selon leur état, une conduite morale honnête. Cette exigence s’impose à un double titre. D’abord parce que le Bien Commun est ordonné au bien des personnes (note 8) et que, dès lors, il n’y a pas de Bien Commun quand il n’y a pas pour chacun la possibilité d’un développement aussi complet que possible de sa personnalité. Ensuite parce que la qualité humaine des individus influence la vie de toute la communauté en sorte que celle-ci ne peut connaître un épanouissement heureux si ses membres n’apportent pas une valeur physique, intellectuelle et morale satisfaisante. L’homme se trouve à l’origine et à la fin du processus social : tout est fait pour lui et tout vient de lui (note 9). » (note 10)

Parlant de la société moderne de consommation qu’il eut le temps de voir (il est mort en 1994), Léon Degrelle disait : « l’œuvre factice de leur temps s’effondrera. Elle s’effondrera parce qu’elle était contraire aux lois mêmes du cœur, et – disons le grand mot – aux lois de Dieu. Lui seul, si fort qu’on en ait ri, donnait au monde son équilibre, orientait les passions, leur ouvrait les vannes du don complet et de l’amour authentique, indiquait un sens à nos jours, quels que fussent nos heurs et nos malheurs. On pourra réunir toutes les Conférences du monde, rassembler par troupeaux les Chefs d’État, les experts économiques et les champions de toutes les techniques. Ils soupèseront. Ils décréteront. Mais, au fond, ils échoueront car ils passeront à côté de l’essentiel. La maladie du siècle n’est pas dans le corps. Le corps est malade parce que l’âme est malade. C’est elle qu’il fallait, qu’il faudra coûte que coûte guérir et revivifier. La vraie, la grande révolution à faire est là. Révolution spirituelle. Ou faillite du siècle. Le salut du monde est dans la volonté des âmes qui croient. » (note 11)

C’est en citant le rexiste José Streel que nous résumerons notre idéal national-catholique : « Nous voulons que la religion soit au centre de tout, qu’elle inspire tout, qu’elle commande tout […] La seule politique aujourd’hui possible pour nous consisterait à incarner la théologie dans la réalité sociale. Parce que le catholicisme est une doctrine d’incarnation : de Dieu dans un homme, du Christ dans le pain, de la Vérité et de l’Amour dans la vie. Si l’on veut, nous sommes des clercs qui ne consentiront à trahir le pur service de l’esprit qu’au profit de la réalisation du Royaume de Dieu parmi les hommes. Nous ne travaillerons pas pour un moindre salaire. » (note 12)

Nous terminerons par citer Mgr Freppel, vénérable évêque d’Angers et farouche adversaire, comme député, de la IIIème République : « Le plus grand malheur pour un siècle ou un pays, c’est l’abandon ou l’amoindrissement de la vérité. On peut se relever de tout le reste ; on ne se relèvera jamais du sacrifice des principes. Les caractères peuvent fléchir à des moments donnés, et les mœurs publiques recevoir quelque atteinte du vice ou du mauvais exemple ; mais rien n’est perdu tant que les vraies doctrines restent debout dans leur intégrité. Avec elles tout se refait tôt ou tard, les hommes et les institutions, parce qu’on est toujours capable de revenir au bien lorsqu’on n’a pas quitté le vrai. Ce qui enlèverait jusqu’à l’espoir même du salut, ce serait la désertion des principes, en dehors desquels il ne peut rien s’édifier de solide et de durable. Aussi le plus grand service qu’un homme puisse rendre à ses semblables, aux époques de défaillances ou d’obscurcissement, c’est d’affirmer la vérité sans crainte, alors même qu’on ne l’écouterait pas ; car c’est un sillon de lumière qu’il ouvre à travers les intelligences ; et si sa voix ne parvient pas à dominer les bruits du moment, du moins sera-t-elle accueillie dans l’avenir comme la messagère du salut. »

Alors, comme le disaient les miliciens fusillés par les épurateurs gaullo-communistes au Grand- Bornand : « Vive le Christ-Roi, vive la France ! »

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Notes

1 / Lettre apostolique Praeclara gratulationis, 1894.

2 / Citations rapportées par Jacques Ploncard d’Assac dans Doctrines du nationalisme.

3 / Suite à l’expédition du général Oudinot en 1849 qui permit au pape Pie IX de retourner à Rome, un contingent de l’armée française resta présent dans la Ville éternelle jusqu’en 1870, empêchant sa prise par les partisans de l’unité italienne, sans compter, dans les années 1860, les nombreux Français qui se portèrent volontaires dans les zouaves pontificaux.

4 / Remarquons tout de même que les Habsbourg non plus n’eurent pas beaucoup de scrupules à s’allier à des protestants contre la France, notamment sous Louis XIV…

5 / Citation de Louis Veuillot en 1842.

6 / La réponse de l’Espagne, José Antonio Primo de Rivera.

7 / Surtout en raison du tournant libéral pris dans les années 1950.

8 / « La fin de la multitude rassemblée en société est de vivre selon la vertu », disait saint Thomas d’Aquin dans son De Regno.

9 / « la société est faite pour l’homme et non l’homme pour la société » disait le pape Pie XI dans son encyclique Divini Redemptoris.

10 / La Révolution du Vingtième Siècle, José Streel.

11 / Les âmes qui brûlent.

12 / Les jeunes gens et la politique.